521 !

C’est le nombre d’ouvrages attendus à la rentrée littéraire de 2021 selon LivresHebdo. Si ce n’est pas un record, (654 il y a 10 ans, 560 il y a 5 ans), ce nombre reste cependant important et impressionnant. D’ailleurs, si l’on fait les calculs, les chiffres montent très vite, autant en termes de papiers, que de transports ou de production…
Alors, l’édition et l’écologie ont-elles une chance de se rejoindre ou sont-elles vouées à se confronter éternellement ?

Publier un livre, pollue considérablement. Les tirages, le papier et même l’encrage ont un impact sur notre chère planète. On découvre dans une étude réalisée par Hachette qu’un livre équivaut en matière d’émission de CO2, à un steak de 130 grammes de viande rouge ou à plus de 6 kilos de pommes de terre. Comparaison certes, fâcheuse, mais pertinente. Elle nous découvre que la fabrication du livre est une très grande consommatrice de CO2 et permet de détailler quelques pourcentages :

71 % des émissions proviennent de la fabrication (livre, impression, transport)

– 17 % des émissions proviennent de la distribution

– 10 % des émissions proviennent de la conception du livre

– 2 % des émissions proviennent de sa diffusion

Ce sont donc bien ces 71 % les grands coupables de cette industrie. Ceux à pointer du doigt et à renverser. Lorsque que les tirages s’enchainent, les impressions se multiplient et la surproduction s’impose. Les risques d’entraîner de tristes conséquences, augmentent également.

Enquêtons…

Une de ces conséquences concerne les retours et les invendus. Le SNE l’explique aussi en nombre de tonnes à l’année. Il recense plus de 199 100 tonnes par an de livres transportés par les distributeurs vers les points de ventes habituels comme les librairies, les grandes surfaces culturelles… Cependant, ce flux « Aller » est à prendre en compte avec le flux « Retour » qui est de 42 200 tonnes de livres par an. Ces 42 200 tonnes sont soit pilonnées (détruites), soit réintégrées dans le stock ou triées. Dans tous les cas 13,2 % du tonnage du flux « Aller » sont destinés au pilon.

Qu’est-ce que veut dire ce charabia ? Tout simplement qu’un énorme gaspillage est à déplorer chaque année et que des tonnes de livres terminent à la poubelle. Mais qu’en est-il plus concrètement, à notre échelle ?

Du côté de chez nous

Afin de comprendre ces flux directement en partant des lecteurs, j’ai mené une petite enquête auprès des abonnés Instagram de Nombre7 sur vos pratiques d’achat de livres pour illustrer ces propos. Plus de 40 abonnés ont répondu au sondage.

Ainsi, la consommation de livres des abonnés Nombre7 semble plutôt élevée : pour plus de 44 % des interrogés, plus de 30 livres sont achetés par an. Les abonnés Nombre7 préfèrent d’ailleurs acheter des livres neufs plutôt que d’occasion, car pour 50 %, le choix de l’occasion ne se fait que « parfois » et pour le reste, cela ne se fait que « rarement » (23 %) voire « jamais » (23 %). Il en est de même pour les livres en bibliothèque, la majorité n’emprunte « jamais » (35 %) de livres. Pour ceux qui ont l’habitude de côtoyer les bibliothèques, les livres achetés restent préférés aux livres empruntés, c’est le cas pour 61 %. Cependant, lorsque les lecteurs abonnés à Nombre7 se séparent de livres, ils prennent soin de les donner (53 %) ou de les revendre (30 %).

Ces donnés montrent une envie considérable d’acheter du livre neuf, une volonté d’achat importante et surtout, une pratique de l’occasion ou de l’emprunt qui est délaissée. La consommation de livres est régulière, renouvelée et avide. Elle participe activement à ces flux « Aller » et « Retour », cités précédemment.

Végétarien ou lecteur ?

À vous de choisir ! Préférez-vous baisser votre consommation de viande ou de livres, si le résultat est le même ? Peut-on vraiment être un écolo lecteur ? Heureusement, nous n’en arriverons pas aussi loin. Le monde de la culture reste très engagé et propose désormais plusieurs solutions à cette surproduction polluante. Pas besoin de laisser tomber la viande ou les polars ! Nous avons bien évidemment déjà évoqué l’ebook dans cette transition « littécologique », littéraire, mais écologique. Mais d’autres possibilités éditoriales sont aussi possibles. Le tirage à la demande que nous préconisons chez Nombre7, s’inscrit dans cette démarche. Il permet à notre échelle, de proposer une alternative et d’offrir une solution à cette surproduction. Les retours de librairies sont ainsi maîtrisés et les productions du livre sont surveillées.

Il s’agit d’éviter le gâchis et de répondre au plus proche de la demande afin de garder une certaine humilité et surtout de ne produire que le strict nécessaire. Pas de surplus ni de pilonnage.

D’autres maisons d’éditions ont également mis en place l’utilisation de papier recyclé ou d’encre moins polluante. On découvre que beaucoup d’améliorations pourraient participer à une édition plus verte et moins gaspilleuse.

En faire moins pour en faire plus.

Le tirage à la demande et contrôlé permet d’avoir plus de marge pour plus d’auteurs. C’est le succès qui mène le tirage et non l’inverse. Ce fonctionnement défend une certaine égalité, chaque auteur a le droit à sa chance et peut atteindre les sommets. Aucun n’est privilégié. C’est une énième manière de combattre l’élitisme dans la lecture, dans l’écriture et plus généralement dans la littérature. La lente évolution de l’édition devrait tendre à ce partage, cette accessibilité qui participerait au renouveau de la littérature.

Le livre est mort ? Tout au contraire ! Surtout si on lui permet de survivre en cette jungle hostile et si on lui donne les outils pour perdurer. Il s’agit d’ouvrir les yeux sur des traditions et principes éternels qui règnent dans ce domaine et de les exposer pour mieux les redéfinir. Cette évolution s’adapte ici à un monde plus vert dont nous avons cruellement besoin, surtout au regard des récentes actualités qui dénoncent tristement une pollution très préoccupante. La littérature et l’édition vertes sont une réponse au gaspillage qui est une première étape à repenser. Éditons moins pour mieux éditer !

Catégories : Actualité

Gilles Arnoult

Éditeur et Directeur chez Nombre7 Editions, c'est un parcours multiple qui m'amène aujourd'hui à intervenir dans cet environnement littéraire qui m’a accompagné toute ma vie. Je suis à présent acteur de ce secteur avec un projet destiné à faire émerger de nouveaux auteurs et définir une "nouvelle frontière" pour l'édition.

1 commentaire

MARIE-ROSE ROGISTER · 12 juillet 2021 à 18 h 34 min

C’est super génial. Je me réjouis de cette belle avancée.
Belle journée.

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