Floriane Vélasquez récit Nombre7

Interviewer Floriane Vélasquez en plein confinement dû au coronavirus, c’est prendre une claque supplémentaire par rapport à ses propres histoires, à ses peurs, à ses craintes et parfois à ce nombril que l’on regarde un peu trop souvent…

Bonjour Floriana, tout d’abord, comment vivez-vous cette crise sanitaire sans précédent ?

Si vous lisez mon livre «Changer la Merde en Or», vous saurez que j’ai déjà vécu l’isolement à cause de la maladie. Que suite aux séquelles de mon  AVC, je ne peux plus travailler et que ma vie s’en trouve totalement modifiée depuis 5 ans. Le récent confinement dû à la pandémie Covid-19 ne change que très peu mon mode de vie habituel, et ne perturbe pas profondément mon mental. Toutefois, je conçois que ce soit un réel bouleversement pour tous ceux qui vivent au rythme effréné que la société leur impose. Je souhaite que ce temps de pause soit aussi bénéfique sur les esprits épuisés, qu’il apporte recul et sagesse aux esprits effrayés face à la dramatisation médiatique, tout comme il a été salvateur pour moi, lorsque l’isolement m’a été imposé par la vie. Toute crise importante apporte son lot de malheur et de bonheur et je souhaite que nous sortions grandit de celle-ci.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

J’ai longtemps enseigné les Arts Plastiques à des collégiens dans le cadre de l’Education Nationale. J’aime aussi bien transmettre que créer. Aujourd’hui, ma carrière de prof est interrompue et je peux me consacrer exclusivement à la création sous toutes ses formes. Plasticienne dans l’âme, j’aime avant tout la transformation du matériau brut (les faits ou le sujet) en un ouvrage ou une création, que ce soit une histoire ou bien un tableau.  L’écriture est une aventure artistique tout comme la peinture.

Une artiste touche à tout ?

Vous avez été longtemps enseignante en arts plastiques que vous avez également pratiqué parallèlement à votre profession : peinture, sculpture, photographie … peut-on dire que vous êtes une artiste touche à tout ?

On peut dire que je suis une artiste touche à tout, car j’utilise aussi bien la peinture, la sculpture, la photo que l’écriture. Si l’on considère que l’art n’est qu’un outil d’expression, on peut aussi dire que je change d’outil en fonction de ce que j’ai besoin ou envie d’exprimer.  Je n’ai pas envie de m’enfermer dans une seule forme artistique, il n’y a là aucune dispersion à mon avis, mais un champ élargi de possibilités qui se complètent. L’essentiel étant l’œuvre et non les outils. Je dirai à l’instar de Picasso : «quand je n’ai pas de bleu, je mets du rouge». ou pour prendre une référence littéraire: «Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse» de Musset.

Artiste Floriana Vélasquez

Lorsque j’ai discuté avec Floriana, j’étais persuadée que son parcours artistique avait été un support pour elle dans les moments sombres qu’elle a vécu. Pourtant, à cette question, elle m’a répondu par la négative… et vous verrez que c’est bien d’autres disciplines qui l’ont accompagné vers cette sagesse qu’elle a aujourd’hui.  

Et si nous parlions de Changer la Merde en Or ”, votre dernier roman ?

Mon dernier ouvrage « Changer la Merde en Or » raconte les épreuves très rapprochées qui me sont arrivées en 2015 : un cancer et un AVC. Un récit assez réaliste ponctué d’anecdotes légères et de découvertes inattendues sur la maladie et sur les changements qu’elle impose. Un parcours à la fois médical, philosophique et humain. 

Ce titre, relève t-il une intention ? vous cherchez à choquer à amuser ?

Avec un titre pareil, vous ne risquez pas de passer inaperçue sur les rayons des librairies !

Le titre est volontairement provocateur, j’en suis bien consciente. Sur les conseils de Gilles Arnoult je l’ai fait évoluer, car initialement je l’avais intitulé «La Merde».  Tout d’abord j’avais l’intention d’interpeller le lecteur, et ensuite il m’est apparu que «Changer la Merde en Or» faisait référence à la transmutation alchimique même s’il s’agit pour l’alchimiste de changer le plomb en or. La profonde transformation de l’être qui s’opère lorsqu’on ouvre les yeux sur une certaine réalité.

Comme beaucoup de personnes qui ont vécu des situations difficiles, Floriana est allé chercher des questions à ses réponses. Elle a très vite senti qu’elle devait rapprocher son corps de ses émotions, réunir son cerveau droit et son cerveau gauche, faire confiance à ses intuitions.
Un travail sur elle-même qu’elle continue aujourd’hui encore. Ce qui m’a intéressée est son approche de l’alchimie, science physique devenue psychologique grâce au psychiatre Jung. Pour Floriana, nous faisons partie du vivant, nous n’en sommes que des éléments et non pas des maîtres.  

Un résumé de Changer la Merde en Or ?

Ce livre s’adresse à tout le monde. A ceux qui se posent des questions existentielles sur la vie et la mort,  à ceux atteint dans leur chair par la maladie, ainsi qu’à l’entourage des malades, accompagnateurs de l’ombre qui souffrent autant que les malades.  Mais également à tous ceux qui ressentent intimement  le malaise actuel : fatigue chronique, découragement, perte de sens,  course perpétuelle, absurdité de nos modes de vie actuels.  C’est pour cette raison que ce livre, même s’il est intime, est entièrement d’actualité.

Selon vous, un artiste écrit-il d’une façon différente que les auteurs qui n’ont pour “seule” voix d’expression l’écriture ? A quoi pourrait-on reconnaître le roman d’un.artiste ?

Je ne sais pas si un artiste écrit de façon différente d’un auteur, car un auteur est aussi un artiste me semble t-il. Toutefois, il semble évident que plus on dispose de cordes à son arc, plus on a le choix des moyens.  Je me répète peut-être mais l’art n’est qu’un moyen, un outil. Par exemple, il y a peu de comparaison entre mon premier roman Le Pavillon des Matriochkas avec ses personnages pittoresques, et le récit polymorphe et thématiques de Changer la Merde en Or.  J’essaie d’adapter les outils à ce que j’ai à dire, parce que pour moi, le fond du propos doit être en accord total avec la forme. La forme romanesque ne me semblait pas adaptée au récit de mes maladies, alors qu’elle me convenait parfaitement pour le récit de la folie ordinaire qui est évoquée dans Le Pavillon des Matriochkas.  C’est peut être à cela que l’on reconnait le roman d’un artiste : une recherche d’adéquation entre le propos et la forme sous laquelle on choisit de le présenter. Et tant pis si cela passe pour de l’inconstance !

Ce moment de confinement est-il propice à la création ?

Je suis en perpétuel projet d’écriture. J’en mène plusieurs de front. Que ce soit des billets d’humeur sur la société et l’actualité, des poèmes, des débuts de romans, j’ai toujours de l’encre sur les doigts ou une idée qui mijote dans un coin de cerveau. Ce sera peut-être une dystopie sur les conséquences de la pandémie Covid 19…  Surprise !

Olivia Mahieu
Rédactrice web


Gilles Arnoult

Éditeur et Directeur chez Nombre7 Editions, c'est un parcours multiple qui m'amène aujourd'hui à intervenir dans cet environnement littéraire qui m’a accompagné toute ma vie. Je suis à présent acteur de ce secteur avec un projet destiné à faire émerger de nouveaux auteurs et définir une "nouvelle frontière" pour l'édition.

1 commentaire

Floriana Vélasquez · 5 avril 2020 à 19 h 07 min

Merci à Nombre7 de m’avoir accorder cette interview et merci pour le petit clin d’oeil à Marseille, ma ville, celle qui a toujours une place de choix dans mes écrits.
Bien vous
Floriana

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